
En refermant ce livre, j’ai deux réactions . La première c’est « Woww!! ». Quel voyage ! Mais quel voyage ! La deuxième c’est « Oui mais d’accord mais il va y avoir une suite, n’est-ce-pas ? Il me manque des certitudes là ! « ..
J’ai pris ma respiration avant de plonger dans ce roman que j’attendais, ayant beaucoup aimé « Quitter les Monts d’Automne » de la même auteure, et il me faut choisir mon moment pour chaque livre. Chaque livre dont j’aime l’auteur, dont j’attends beaucoup. Pour les « autres moments » il y a les « petits thrillers » qui me sont de bonne compagnie en général. Sauf le dernier de K.L. Slater que j’ai jeté à l’autre bout de la pièce, ma vieille habitude quand c’est nul ou mal écrit.
Nous sommes en 2563. La Terre est en mauvais état, l’humanité tente pourtant des « réparations ». En même temps, plusieurs stations spatiales autour de la Terre sont en fonctionnement depuis longtemps, dont Taihe-Concordia, immense station spatiale accrochée à la Lune qui est peuplée de milliers de personnes, des Terriens y travaillent, d’autres y sont nés. Ceux qui sont nés sur Concordia sont appelés les Sélènes. Des terriens de tous pays se retrouvent sur Concordia, de tous pays, mais une majorité d’entre eux sont d’origine chinoise, ou chinoise mixte.
Le personnage que nous rencontrons en premier est Brume, d’origine vietnamienne. Elle vient à Paris dire au revoir à son père, car elle va embarquer pour un très long voyage. Elle est oceanographe spécialisée en bioaccoustique sous-marine. Elle a été recrutée pour rejoindre la planète Nüying, car des sons ont été captés venant de là-bas, des sortes de chants, et tout ce à quoi on peut les comparer sont les chants des cétacés ou de mammifères marins.
De plus, la planète semble contenir de la vie, même si elle ne semble formée que de banquise, de volcans et d’eau. Elle ressemblerait à la Terre d’avant l’homme. Il faut l’explorer, et s’il y a de la vie, pourquoi pas un « Premier Contact »?
Mais il faut 24 années lumière pour y arriver, en partant de Concordia.
Et il faut se préparer à l’expédition : même si Brume et environ deux cents autres scientifiques ou prospecteurs voyageront en cryostase et ne seront réveillés que près de Nüying, il y a tout un apprentissage à faire et à partager en vue de cette planête : comment s’y déplacer, comment vivre, comment utiliser les machines nécessaires à celà, entretenir les équipements, communiquer avec la base, etc.
Et les trois cents autres « navigants » du vaisseau doivent vivre le mieux possible sur cette embarcation, le « Cargo-monde » qui est en pleine construction.
Le roman est scindé en trois parties, soit « Avant le Voyage », « Pendant« et « Après ».
Avant, nous faisons connaissance avec d’autres personnages, comme Will, d’origine québécoise, scientifique cybernéticien, Dana et Meriem, toutes deux scientifiques, et leur fille Anouk, les membres du « Gouvernement », et le Président, Jonathan Wei, sino-américain, milliardaire, propriétaire du programme Space O, charismatique et puissant, (on ne peut penser qu’à Elon Musk) qui cherche, lui, à approfondir la RNA, la Réincarnation Numériquement Assistée.
Il a plus de soixante ans, il a réussi à faire le clonage de ses cellules, mais il faut que sa mémoire et sa personnalité soient « enregistrés » pour lorsque ses futurs clones seront prêts, l’un après l’autre, ils soient bien en entier lui-même à chaque fois. En fait, pour qu’en quelque sorte il atteigne l’immortalité. Cette « folie » est à portée de main, ou de machines, depuis des années.
On fait ainsi connaissance avec non seulement les personnages centraux du livre, mais aussi avec leur entourage, leurs rapports à la famille, à la tradition, à leur culture, à leurs interactions sociales, ce qui nous fait les aimer et comprendre leurs réactions.
J’ai remarqué aussi la distinction faite entre les Sélènes et les « Terriens », les Sélènes faisant l’objet d’une discrimination peu visible mais réelle. La culture terrienne est partout, sur Concordia, ce qui fait que toutes les personnes nées sur Concordia ne se sentent pas tous attirés par une planète dont ils ne peuvent se souvenir, alors que tout, les écrans, les décors, les rues, les quartiers sont le reflet de tout ce qu’il y a sur terre. Les « paysages » partout sont créés pour ressembler à la Terre. Les jardins, les restaurants, les fêtes, les Temples… car ici la philosophie bouddhiste est au premier plan.
C’est devenu une religion qu’on peut qualifier de sectaire, prosélytisme, manifestations anti « gouvernementales », et les Sélènes y trouvent leur compte, contre les dirigeants terriens de l’OSNU. Pendant le voyage, d’ailleurs, on sent bien que le moine bouddhiste Sonam Tsering, qui reste dans l’ombre de Jonathan Wei est plus puissant qu’il n’y semblait. De nombreux Sélènes navigants ont rejoint cette religion, et les clones du dirigeants semblent peu a peu altérés. Il y a même un « suicide collectif » des adeptes de la religion « Terre d’Eveil »….. ce qui me fait penser à la secte Américaine « Heaven’s Gate » (voir le livre de Quentin Bruet-Ferreol), et la catastrophe arrive plus vite qu’on ne voudrait. En ayant compris la défiance des moines tibéthains envers les chinois, tout éclate, et le cargo-monde se sépare en deux parties. Et de la fin je ne dirai rien, tant elle est à la fois prometteuse et bien trop elliptique. J’en ressors frustrée, de cette fin.
Si tout ce monde est passionnant dans les deux premières parties, aussi bien dans les détails, les personnages, leurs relations, la vie, la poésie, la délicatesse du style, j’ai fait un aterrissage brutal sur cette fin si courte et même si je comprends le pourquoi, il me manque beaucoup de choses. Même si je spoile, là, je ne peux pas croire que les bouddhistes aient réussi à atteindre le Nirvava à l’aide d’un vaisseau spatial affrété par un milliardaire ! Ce n’est pas juste…. Je comprends la fin, bien sûr, je ne voulais pas spoiler : c’est tellement à la fois bien trouvé, spirituel, mais si….frustrant de n’avoir pas toutes les réponses livrées sur un plateau. Il faut laisser ses propres idées et intuitions, guidées par la délicate peinture d’Emilie Querbalec, trouver leur chemin, en douceur…
Un grand merci à Gilles Dumay, directeur des Editions Albin Michel Imaginaire.
Les chants de Nüying – Emilie Querbalec, ed Albin Michel Imaginaire, sept 2022, 466 pages
Ce roman est dans ma liste d’envies. Je suis très curieuse de le découvrir, ainsi que sa fin abrupte 😉
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Oui mais je ne sais pas du tout si Emilie a prévu une suite… 😢😢
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J’aurais tendance à penser que non. Mais je me trompe peut-être.
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Émilie dit qu’elle fera peut être une nouvelle pour les frustrés de la fin comme moi et d’autres lecteurs !!!!! Donc une suite n’est pas prévue…
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Ah, les fins ouvertes… A voir, peut-être que d’ici quelques années, elle voudra poursuivre cette œuvre ?
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Elle m’a répondu que, peut-être, elle écrira une nouvelle pour les frustrés de cette fin ! Elle est vraiment cool, Emilie Querbalec !
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Elle a l’air, en effet ^^
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[…] D’autres lectures : FeydRautha (L’épaule d’Orion), Les lectures du Maki, Vive la SFFF !, Weirdaholic, Le chien critique, Céline Danaë (Au pays des Caves Troll), Les blablas de Tachan, FeyGirl, Elwyn (Navigatrice de l’imaginaire), Les histoires de Lullaby, Un Bouquin sinon rien, Boudicca (Le Bibliocosme), Mélie et les livres, […]
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J’ai énormément aimé ce livre et franchement j’ai beaucoup apprécié cette fin qui n’est certainement pas celle que j’attendais mais justement la vie et l’avenir ne se plient pas à nos rêves, mais y répondent autrement, d’une manière qui paraît un ratage mais qui est une réussite au delà de nos attentes si on la regarde d’un autre angle, plus spirituel
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J’avais compris. Elle devient déesse immortelle et c’est elle qui chante les fameux « chants » entendus…
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ca a l’air prometteur et votre critique me donne bien envie, je le mets dans ma liste d’envie. Merci.
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