Les sirènes d’Es Vedrá – Tom Charbit

C’est l’histoire d’un DJ mondialement connu qui se retrouve seul dans une maison en pierre, en Ardèche, au milieu de nulle part, avec le Mistral qui souffle, qui siffle, qui le rend fou. Comment en est-t-il arrivé là, c’est tout le sujet de ce roman.

Juan Llosa, 39 ans, raconte comment il est devenu DJ, comment il a passé vingt ans de sa vie à mixer dans les plus grands clubs du monde, comment il a passé ces années en nuits blanches, avec la musique, le sexe, la drogue, l’alcool, l’argent. Il explique le monde du DJ et son fonctionnement, sa façon de vivre, ses erreurs, la femme de sa vie qu’il a laissée tomber à 18 ans, et toutes les autres. Et il raconte sa descente aux enfers à cause de ses crises d’acouphènes qui le rendent fou. Jusqu’à avoir des moments de surdité totale.

Son style est désabusé, ironique, il me fait penser à du Beigbeder, en fait.

Il raconte comment, pour ne pas devenir sourd, il a échangé son appartement parisien contre une maison en Ardèche, avec un copain DJ. Un médecin lui a conseillé le calme absolu, mais il arrive en hiver dans ce petit bourg qui doit grouiller de touristes l’été, mais qui semble totalement vide.

La maison, récemment réaménagée, est faite de baies vitrées côté salon, et la vue est exceptionnelle. Les montagnes, la rivière, les rochers, les cailloux, les arbres presque morts et presque déracinés, et surtout ce vent qui siffle, qui claque, qui donne froid, qui rend fou aussi.

Lorsque peu à peu il sort de la maison pour aller faire ses courses au bourg, il fait des connaissances, et des amis de son pote DJ deviennent peu à peu des amis.

Il rencontre des viticulteurs bio, des écolos purs et durs, des fanatiques de l’amour tantrique, des hommes qui ne quittent pas le bord du comptoir du bar du coin, la boisson du cru, les retraités qui connaissent l’histoire du pays, les guerres, les invasions.

Et les parents de la femme qu’il a toujours aimée qui perdent la mémoire et qui sombrent dans l’Alzheimer, les écrivains qui philosophent sur la meilleure façon de retrouver le bonheur, qui passent à la radio, la musique actuelle faite pour plaire aux masses……

Et là, l’histoire commence à devenir, pour moi, une occasion de régler ses comptes ou de donner son avis, négatif bien sûr, sur les faits de société : on commence avec les réunions pour militer contre le gaz de Schiste, les activistes écologiques, et là il fait un parallèle entre cet activisme de révolte et sa propre musique :

« ..la musique que j’ai jouée et contribué a faire connaître, elle vient de cette révolte du peuple »… (j’en suis restée comme deux ronds de flan, moi)..

Le reste du livre est à l’avenant : chaque moment avec des amis, chaque discussion lui offre la possibilité de, tout en ne prenant pas part à la conversation, donner son opinion dans le livre, si possible en s’énervant, sur divers sujets comme les sociétés américaines de produits chimiques, contre les gens qui exposent leur vie à table, contre les méfaits du porno dans l’amour chez les jeunes, les végans, les restos vegans, les vins « bio » vegans, les sextoys, le cerveau reptilien et j’en passe.

La première moitié du roman était bien, la deuxième moitié a été lourde à lire. Tous ces sermons sous prétexte de donner son avis……sans que ça soit dans une conversation, un débat, ç’aurait été moins indigeste.

Ce roman m’a bien plu, le ton et le style aussi. Dans la première partie. Dans la deuxième partie, même sous-tendue par son histoire d’amour tragique avec Ana, on se noie. J’ai survolé des paragraphes entiers, à force d’être engluée dans ses opinions sur tout et n’importe quoi. Si j’ai terminé le livre, c’est bien pour savoir ce qui arrivait à Ana. En fait, Tom Charbit aurait dû reprendre son souffle un peu, et continuer dans la veine de la première partie. Je trouve dommage de fiche en l’air un bon début avec un joli style, intéressant, pour tomber dans le verbiage.

J’ai reçu ce livre dans le cadre d’une opération Masse Critique Babelio en partenariat avec les Editions Seuil.

Les sirènes d’Es Vedra – Tom Charbit, ed Seuil, 330 pages, sortie le 6 Janvier 2022

(et je n’ai rien dit ni du titre, peu attrayant, ni de la couverture, d’un goût discutable, juste le petit personnage est bien, mais ces couleurs… !! on dirait un roman à l’eau de rose ou un livre autoédité)

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