La femme qui se cognait dans les portes – Roddy Doyle

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Je tiens à remercier l’Irlande d’avoir donné la vie à Roddy Doyle, et Roddy Doyle d’avoir cette force et ce talent. Je remercie aussi Dublin, tant que j’y suis, et le nord de Dublin en particulier.

Roddy Doyle est un écrivain irlandais, (je vous l’avais dit), né en 1954. Il grandit à Kilbarrack, quartier populaire dans le nord de Dublin (ça, vous l’auriez deviné). Après des études à l’University College Dublin, il enseigne la géographie et l’anglais dans une école du nord de Dublin à partir de 1979. Parallèlement, il écrit son premier roman, « The Commitments », l’histoire de jeunes de dublinois qui décident de former un groupe de musique soul. Un mélange hétéroclite et hilarant, d’ailleurs, que ce groupe. Le roman, publié en 1987, est salué par la critique.  Doyle écrit par la suite deux nouveaux tomes, qui compléteront la trilogie de Barrytown : « The Snapper » (1990) et « The Van » (1991), finaliste pour le Booker Prize. Cette trilogie aura un succès populaire énorme en Irlande et sera adaptée au cinéma par Alan Parker (The Commitments, 1991) et Stephen Frears (The Snapper, 1993 ; The Van, 1996), consacrant mondialement le jeune écrivain irlandais. Cette trilogie, qui relate la saga de la famille Rabbite, famille des quartiers populaires de Dublin, inspirée par la vie personnelle de Roddy Doyle, impose le style « jocoserious » un humour corrosif, un style cru, s’appuyant sur la culture orale des quartiers populaires de Dublin. En 1997, il publie « La femme qui se cognait dans les portes » (The Woman Who Walked Into Doors), puis la suite, « Paula Spencer », en 2006. Sa traductrice française, Isabelle D.-Philippe, mérite une mention spéciale, une ovation et un tonnerre d’applaudissements  pour avoir traduit ces romans-là en restituant quasiment intact ce style d’écriture.

Résumé : Le livre s’ouvre sur la mort de Charlo, le mari de Paula, 4 enfants, 39 ans. Son mari qu’elle a mis à la porte un an plus tôt. Il est mort, abattu par les Guards (policiers irlandais). Lorsqu’elle l’apprend, Paula revient au jour où elle l’a connu, vers ses 17 ans. Elle en est devenue immédiatement amoureuse, lui l’a aimée depuis ce jour aussi. Cet homme va pourtant la battre, presque la tuer, pendant dix-sept ans.  Cette mère de famille revient sur son enfance, sur l’école et son milieu social qui l’ont faite telle qu’elle est : de famille pauvre, habituée aux insultes jetées aux filles « quoi que tu fasses ou que tu ne fasses pas : tu es une salope », habituée à être polie, gentille, aimable, elle sait par ailleurs que les garçons ne le sont pas. L’enfance et l’adolescence de Paula sont tragicomiques, des souvenirs de bêtises ou de bons moments avec ses soeurs et ses amis, elle en a et nous en raconte. Ce n’est qu’au dernier quart du livre que soudain, elle raconte. Tout. Du tout premier coup, les excuses de son mari, ses espoirs que ça ne recommence pas, jusqu’aux moments où elle ne vit plus parce que tout sera prétexte aux cruautés d’un mari violent. Et ensuite, elle s’accuse, elle. Et si elle n’avait pas répondu? Et si? Et si?.. et les coups pleuvent, les dents cassent, les os aussi. On est estomaqués de ces douleurs, de ce qu’elle ressent, de ce qu’elle pense. Ce sont dix-sept ans de vie dont on ne croit pas qu’on puisse se remettre..

Mon avis : J’adore ce Roddy Doyle. J’adore la littérature irlandaise, l’écrit du « parlé ». J’aime ces ouvertures sur ce milieu ouvrier des banlieues dublinoises qui a donné à l’Irlande de grands écrivains, d’immenses écrivains. Mais plus encore, dans ce roman-là, je suis époustouflée de la façon dont Doyle s’est enfoncé dans la peau de cette femme battue, dans sa peau et dans ses réflexions. Ce roman date de 1976, et, bon sang, rien n’a changé pour elles. Même en France ! Bref. Ce roman est un pur chef d’oeuvre.

 

 

 

 

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