Je suis la maman du bourreau – David Lelait – Helo

« Prier Dieu, se vouer au Diable.
Du haut de ses quatre-vingt-dix ans, Gabrielle de Miremont semblait inatteignable. Figée dans l’austérité de la vieille aristocratie catholique dont elle est l’incarnation. Sa devise : « Ne jamais rien montrer, taire ses émotions ». Jusqu’à ce matin-là, où un gendarme vient lui annoncer la mort de son fils. Son fils cadet, son enfant préféré, le père Pierre-Marie, sa plus grande fierté. Gabrielle ne vacille pas, mais une fois la porte refermée, le monde s’écroule. Cet effondrement, pourtant, prend racine quelques semaines plus tôt, à la suite d’un article de presse révélant une affaire de prêtres pédophiles dans sa paroisse. Révoltée par cette calomnie, Gabrielle entreprend des recherches. Des recherches qui signeront sa perte. Ou sa résurrection ».

Ce titre de livre m’interpellait depuis un moment, j’ai donc craqué. Comme d’habitude, sans vraiment regarder le résumé (copié-collé ci-dessus).

D’une écriture très élégante et souvent poétique, l’auteur emmène son lecteur dans les traditions d’une famille de la haute bourgeoisie de province, très catholique, peu chaleureuse, pétrie des croyances et certitudes que les générations précédentes ont forgées. Madame de Miremont est veuve, a quatre-vingt onze ans, mais toute sa tête et dévouée à Dieu. Toute sa vie a été, comme elle le croit, uniquement vouée à Dieu. L’arrivée de ses deux filles l’a laissée quasiment indifférente, mais le troisième, un garçon, elle allait l’offrir à Dieu. Dès le plus jeune âge la Bible est le livre d’histoires du soir, des jours. Et lorsqu’il a été grand, ça a été une évidence pour tous les deux qu’il entre au séminaire. Son ordination a été le moment d’extase de Madame. Lorsqu’il a été mis en poste à l’église du quartier, la joie de la mère et du fils de pouvoir se voir tous les jours. La fierté de Madame. Les kermesses, les bonnes oeuvres, c’est elle qui dirige tout. On la connait bien.
Lorsque le journal local dénonce « Pédophilie dans notre Diocèse », Madame, outrée, dégoûtée, fonce directement dans les locaux du journal, interpelle le journaliste en criant au scandale, au mensonge, à l’absolue noirceur qui a dirigé ces mots. Pourtant, le journaliste dit qu’il a des témoins. La semaine suivante, en une du journal, un homme ne cachant ni son nom ni son visage raconte qu’un prêtre l’a détruit. En camps scouts, au presbytère, pendant des années. Horrifiée Madame demande si il peut venir lui expliquer. Si c’est vrai elle acceptera. Et c’est là que tombent les masques, et les horreurs répétées. En détail. Et Madame de Miremont va tomber de haut, de très très haut.

Livre-témoignage sous couvert de fiction, on se rend compte du mécanisme de pensée de ceux qui ne veulent pas voir, ceux qui se justifient au nom de l’amour et de Dieu, et ceux qui sont brisés, anéantis.

Ma note : 4 sur 5

Je suis la maman du bourreau – David Lelait – Helo, editions Heloise d’Ormesson, puis Editions Pocket 2022, 212 pages.

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