Landfall- Ellen Urbani

Les couvertures de la collection Totem de chez Gallmeister sont absolument épatantes et attrayantes. Après avoir acheté et lu « Le Jeu de la Dame » il y a quelques semaines, j’en ai fait une razzia. Ce sont pour la plupart des livres de leur collection « Americana » et soudain on -enfin je- découvre tout un pan de la littérature américaine de ces quarante dernières années. C’est.. stupéfiant.

L’auteure : Née en 1969 en Pennsylvanie, Ellen Urbani est titulaire d’un BA en writing and design à l’Université de l’Alabama en 1991.
Elle a fait partie des Peace Corps au Guatemala de 1991 à 1993, avant de rentrer aux États-Unis finir ses études de thérapie par l’art. 
Spécialisée dans les traumatismes liés à la survie, elle a travaillé pour le département de la santé sur les répercussions émotionnelles dues à la maladie et aux catastrophes. 
Son premier livre, « When I Was Elena », paru en 2006 relate son expérience au Guatemala, alors que le pays était en guerre. En 2015, elle publie « Landfall ».


L’histoire : Le 29 août 2005, l’ouragan Katrina s’abat sur La Nouvelle Orléans, semant le chaos, emportant des milliers de vies. Emue par le sort des survivants, Rose, dix-huit ans à peine, et sa mère Gertrude, vivant en Alabama, s’apprêtent à rejoindre la ville meurtrie pour leur apporter des secours, vivres et vêtements. Mais Gertrude perd le contrôle de la voiture, et percute une jeune fille, qui décède sur le champ.

Seule Rose s’en sort. La jeune fille morte ne porte rien sur elle pour l’identifier. Et Rose, étourdie par le choc, ayant laissé ses chaussures à l’intérieur de l’habitacle de la voiture maintenant sur le dos, écrabouillée, attrape les tennis de la jeune morte, les enfile puis s’écroule. Un policier, arrivant sur la scène, prend Rose dans ses bras pour l’amener à l’ambulance.

Quelques jours plus tard, après les funérailles de sa mère, Rose, va au commissariat pour retrouver l’inspecteur McAffrey, celui qui l’a sortie des buissons et du gravier sur la scène de l’accident, pour savoir qui est la fille…. et la police n’en sait rien. Tout juste avait elle dans sa poche une carte de visite d’une fleuriste, et une page d’annuaire qui bizarrement, comporte l’adresse de Rose et de Gertrude.
Obsédée par cette étrange coïncidence, Rose entreprend de retrouver quelqu’un qui puisse lui dire qui était cette inconnue, qui s’avère s’appeler Rosy, et qui avait juste dix-huit ans, comme Rose.

J’ai été très marquée par la catastrophe Katrina. Encore plus par le film de Spike Lee, en 4 parties :  » When The Levees Broke- a Requiem in four acts » qui tient sur 4 DVD. Avec pour musique la trompette de Terence Blanchard, qui fait partie d’un des plus célèbres band de la Nouvelle Orléans.. et les images en contrepoint, des maisons détruites, de la ville inondée à hauteur des toits, les gens accrochés sur le haut, hurlant au secours, sous le soleil de plomb lorsque les pluies ont cessé. Les morts qui dérivent dans l’eau, gonflés. La catastrophe du début à la fin, pointant l’incapacité du gouvernement américain, de la FEMA, du Maire de la Ville protégeant les quartiers blancs, le Superdome, les conditions sanitaires, les vieilles personnes mourant de soif ou de déshydratation dans leur fauteuil roulant autour du Superdome, pendant que la police empêchait ces survivants d’aller plus loin que le pont qui amène vers des endroits où il y a vivres et eau, parce que ce sont des noirs (sous-entendu des voleurs, des violeurs, des meurtriers, des émeutiers)… j’ai mis un petit extrait vidéo en-dessous..

On fait connaissance de Rose, qui vit avec sa mère, seule, sa mère Gertrude qui est « si coincée », et qu’elle supporte juste. Jamais d’affection, et l’absence d’un père ajoute à cette forme de non-affection. Puis Rosy, qui, elle, vit à la Nouvelle Orléans avec sa mère Cilly, qui est bipolaire, et est capable de partir en pleine nuit avec sa fille, en chemise de nuit, pour aller jusqu’en Floride, à Orlando, à Disney World, de passer devant toute la file à la caisse, toujours en chemise de nuit, hurlant qu’elle n’a pas d’argent mais qu’on l’attend, elle et sa fille Rosy…. après les hospitalisations, c’est Rosy qui « gère » les médicaments de sa mère, afin qu’elle prenne régulièrement son lithium, sinon les crises maniaques prennent le dessus.
Et il ne faudrait pas : alors que la télé dit à tout le monde d’évacuer, elles, qui vivent dans le ninth Ward, sous le niveau de la mer, vont rester chez elles car Cilla dit qu’elle a une maison solide, elle en a vu d’autres… elles vont se prendre les vents furieux et l’orage, la situation devient intenable.

Il n’est dit nulle part que Cilla et Rosy sont noires, et que Gertrude et Rose sont blanches. On s’en rend compte peu à peu. Jamais cela n’interfère. Ce roman, alors que chaque paire mère-fille avance vers la vie et la mort, les secrets de chaque mère éclatent à la surface comme des bulles. Gertrude protège sa fille, Rosy protège sa mère. Leur vie est différente mais l’on se rend compte au fur et à mesure qu’un même amour les lie. Les mères et leur fille. Ce qu’elles font pour les élever, ce qu’elles ont voulu leur transmettre. Et la fin, si incroyable.

Ce livre est bouleversant. Puissant, extraordinaire aussi. Terrifiant et chaleureux. C’est un coup de coeur absolu pour moi. Une merveille.

Landfall-Ellen Urbani, ed Gallmeister, collection Totem (poche), 2018, 304 pages, traduction Juliane Nivelt

16 commentaires

  1. j’ai découvert cette maison d’éditions via les blogs et je découvre tranquillement
    celui-ci va directement dans ma PAL car je me souvent de la catastrophe de cette tempête et des dégâts qu’elle a causé, des morts…
    j’aime bien la vidéo

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  2. Quand j’ai vu la couverture et lu le résumé en librairie, j’ai littéralement craqué. Ça fait des semaines que je le
    Regarde, en lisant ta chronique je me dis qu’il va falloir que je le sorte au
    bon moment, je n’ai pas envie de passer à côté de cette merveille !

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