« Barrøy est une terre du silence, les adultes n’expliquent pas aux enfants ce qu’ils doivent faire. Ils le leur montrent. »
Novembre 1944. Le MS Rigel, qui transportent des troupes allemandes et des prisonniers russes est coulé au nord de la Norvège. Des milliers d’hommes périssent, il y a quelques survivants, qui arrivent, gelés, au milieu des cadavres. L’un d’eux arrive sur l’Ile de Barrøy, qui appartient à la famille d’Ingrid. Mais qui y est seule, avec la guerre, tout le monde est parti. L’homme est à peine en vie, dans l’hiver scandinave. Entre lui et elle va se nouer une histoire, malgré la barrière de la langue.
Comme sur un mode d’observation, l’auteur décrit Ingrid, employée d’une des dizaines d’usines de poissonnerie sur le continent norvégien. Tout est glacé. Ingrid découpe et vide les poissons, à bonne vitesse, et elle dort le soir avec d’autres ouvrières, dans des conditions inhumaines, comme partout dans le haut de la Norvège. Après des mois à ce rythme, un beau jour elle va demander son argent au patron, et prend une barque avec des grosses provisions alimentaires, et seule, brave les éléments et les courants pour revenir sur son Ile. Barrøy, elle y est née, mais même si elle est déserte actuellement, c’est chez elle. Elle sait comment faire. Elle remonte la barque sur le ponton, et fait des allers-retours pour aller ranger ce qu’elle avait emmené. Elle nettoie la maison, met du bois dans le poele, et elle voit en ressortant qu’il y a des pantalons jaunes rayés, là où elle voulait poser un filet pour la pèche. Elle les pose sur un fil d’étendage, et ils sont immédiatement gelés tout raides par la température, -20°. Elle en voit d’autres, dans la mer, Ce sont des cadavres. Il y a dû y avoir un naufrage. Elle utilise toutes ses forces pour les amener sur la berge, puis dans une des granges. Et dans cette grange, elle trouve, sous les manteaux de son père, de ses oncles et de son frère, parti à la pèche au loin, elle trouve un homme. Qui respire encore. Elle fera tout pour le sauver, de toutes ses forces. Mais elle a des doutes. Il est habillé en soldat allemand. Les allemands honnis occupent la Norvège, un bout de laponie aussi. Comment communiquer. Comment comprendre qui il est, ce mourant qu’elle veut sauver ? Comment va t’elle faire alors qu’on la prévient qu’elle va devoir accueillir des réfugiés lapons et finlandais ?
C’est un récit contemplatif, au début, puis lorsque l’homme est là, l’auteur nous ouvre les portes des pensées de cette jeune femme forte, forte dans ses muscles, dans sa résistance, dans ses certitudes et sa connaissance de cette vie âpre sur ces archipels où rien ne pousse la moitié de l’année, où on ne se nourrit presque que de poisson, où le confort c’est d’être au chaud et avoir à manger.
J’ai ressenti dans cette histoire une grandeur et une folie qui, par moments m’ont fait penser à « Breaking the Waves ». Et j’ai vraiment aimé cette femme, Ingrid, sa force, ses décisions. On est en 1944, mais c’est intemporel. L’homme contre la mer, contre le vents, les tempêtes et le froid. J’ai vraiment aimé, même si parfois je me suis un peu perdue dans les îles et les bâteaux..
Roy Jacobsen – Mer blanche, ed Gallimard du monde entier, février 2019, 260 pages, 21€. Traduit du norvégien par Alain Gnaedig
Un univers à part, une figure féminine…intéressant
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Oh, au début j’étais un peu perdue, et on s’attache à cette femme, à cette île, à cette vie..
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Pardon, mais ce n’est pas une série ? Car j’ai lu Les Invisibles de Roy Jacobsen et le roman comprenait aussi un personnage nommée Ingrid.
PS : Je m’étais fait ch…^^
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Il a écrit les Invisibles, ça je sais, mais je n’ai lu que celui-ci.. et je crois que j’étais prête à le lire… j’ai mes « moments » pour certains livres…
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thème intéressant ! encore une tentation à l’horizon 🙂
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C’est âpre. Je pense que je l’ai lu au moment où il fallait..
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