Avant que j’oublie – Anne Pauly.

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Le premier mot qui me vient en refermant ce livre, c’est la tendresse. Malgré le fait que Jean-Pierre Pauly, le père de la narratrice, ait été alcoolique, violent envers sa femme, épuisant, et à la fin un peu lourd à porter, Anne Pauly parle dans ce roman, qui me semble bien être autobiographique, de son père, qui vient de mourir à l’hôpital. Elle a appelé son frère, qui, lui, a le permis de conduire et une voiture, pour vider la chambre pour la libérer pour un autre malade. Anne est restée proche de son père, malgré son caractère emporté, son ancien alcoolisme, sa manie de tout conserver, la saleté parfois, depuis la mort de leur mère. Il a dû être amputé d’une jambe, alors il faut récupérer les béquilles, la prothèse, le fauteuil roulant, les vêtements, la trousse de toilette, le contenu détaillé du petit frigo du meuble de chevet, l’armoire. Jean-françois, le frère d’Anne, ronchonne, râle, lui qui se souvient très bien de son père, homme géant et violent, souvent plus dans les mots, envers sa mère et lui-même. Il s’est écarté très vite de ce père invivable, et de sa soeur.

Commence alors le parcours  qui doit être fait par les enfants de cet homme décédé : conservation du corps, aller voir les Pompes Funèbres ( c’est Anne qui raconte, et avec un humour incroyble, entre quelques pensées tristes, elle raconte la  diatribe qu’envoie son frère au pauvre gars des Pompes Funebres..) , et ensuite aller chez le curé, ami d’enfance du père, pour trouver un « créneau » pour la cérémonie.

Les descriptions de l’interieur des vieilles personnes qu’elle va revoir sont pleines de nostalgie déjà, on sent bien que ce sont les derniers survivants du linoléum, des buffets avec vitrine, des tasses Arcopal marron, des boites à biscuits de chez Liddl, parce que « si jamais il vient quelqu’un ».. vous la sentez, là, la nostalgie ? Moi oui. Tellement. Tous ces moments vont être émaillés de petits souvenirs de ce genre, de mille choses qu’on a peur d’oublier,  de son père, ou sa mère, ou de sa grand-mère.. mille petits riens dont ceux qui font encore rire aux larmes.

Cette auteur a un don pour raconter, à la va-comme-je-te-pousse, des fragments de vie de famille, de vie de loin ou de près avec cet homme, qu’elle accompagnera jusqu’au bout. De quoi rire, de quoi culpabiliser (pourquoi n’ai-je pas été plus présente, plus patiente), de quoi avoir une boule dans la gorge en ouvrant telle boite, tel tiroir, la collection de livres qu’on a offert en courant un 24 décembre à la Fnac…. Au milieu des démarches (écrire les adresses de faire-part, voir son carnet d’adresses), il faut choisir les textes pour la cérémonie et l’auteure hésite et souvent imagine que si elle choisissait cette musique, ça aurait un effet comique, elle a peur de rire, et on rit avec elle. On rit avec elle et on est émus avec elle. Lorsque la cérémonie commence on a la boule dans la gorge avec elle. Lorsque peu après elle dit « Ce fut la messe la plus longue de la chrétienté » en racontant les chants faux, le curé qui s’emmele, qui s’endort.., on a le rire aux larmes, de ces formules… 

Et cette maison qu’elle doit « trier ». On passe par toutes les émotions. C’est avec ce style et ces réflexions souvant hilarantes qu’Anne Pauly m’a cueillie, et avec les micro-souvenirs- l’odeur de son savon, les notes qu’il prenait… c’est un mixage magique d’émotions arc-en ciel, jamais mièvres, jamais tristes… Ce livre a reçu le Prix du livre « Envoyé par la Poste » et il est en lice pour le Goncourt.

Moi je dis : comme pour le livre d’Olivier Liron, achetez celui-ci. Il n’est pas très long, il est merveilleux. Offrez-le.

Avant que j’oublie – Anne Pauly, ed Verdier, 140 pages, Juillet 2019, 14€

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